David Bozec: "African cuisine is dominated by spices and natural foods" - Africa Tourism Consultants

Par Enock Bulonza - AFRIK.COM - 30 août 2021


La cuisine africaine a ses petits secrets et ses petites astuces que le chef français David Bozec semble avoir découverts. Dans cet échange en cœur à cœur avec AFRIK.COM autour de sa perception de la cuisine africaine, ce passionné de la gastronomie du continent revient sur les caractéristiques de cette cuisine qu'il explore depuis plus de 10 ans.


Quelle est votre appréciation de la cuisine congolaise après des années d'exploration ?
L'Afrique regroupe 54 pays et chaque zone géographique a des influences différentes. Quand on étudie l'histoire des peuples africains, on constate que les bantous se sont beaucoup déplacés et on retrouve donc leurs recettes un peu partout en Afrique centrale et occidentale. Par exemple, le mafé est préparé avec de la viande au Sénégal et du poisson au Gabon. Beaucoup de gens confondent encore épicé et piquant. En Afrique, tout le monde ne mange pas de nourriture épicée, toutes les recettes ne sont pas épicées.


Souvent le piment est présenté à part, comme condiment. La cuisine africaine comprend rarement des piments et si vous en utilisez, on l'ajoute entier en fin de cuisson pour qu'il n'éclate pas. Au moment du service, de la dégustation, le poivre est retiré, ce qui signifie que le plat est parfumé mais pas piquant. La cuisine africaine est dominée par l'utilisation d'épices et d'aliments biologiques. La richesse de cette cuisine est bio. En Afrique, rien n'est industrialisé, tout est naturel. Dans la culture africaine, les épices ennoblissent le produit. La gastronomie africaine utilise, entre autres, des piments de la Likouala, du Makanisi, de la cannelle, du gingembre, du cumin avec une influence africaine mais aussi arabe.


Pensez-vous que la cuisine africaine gardera toujours son originalité, face à la modernisation de la gastronomie, marquée, entre autres, par les aliments issus d'organismes génétiquement modifiés ?


Manger plus sain, se faire plaisir sans se priver : tout est question d'équilibre ! Aujourd'hui, nous faisons tous le même constat que notre alimentation moderne est confrontée à plusieurs problèmes, trop de graisses saturées, pas assez de fibres, manque de diversité... Les habitudes alimentaires évoluent rapidement : nous entrons dans l'ère de l'inclusion, et l'Afrique viendra là dans les années à venir. De plus en plus de consommateurs responsables optent pour une alimentation plus saine, de qualité et à impact limité, le tout sans être prêt à faire de compromis sur le goût. L'alimentation végétale est une véritable alternative avec une offre très complémentaire et donc précieuse dans cette recherche d'équilibre.

Offrant de plus en plus de choix, le marché des légumes n'est plus vraiment consommé par les contraintes alimentaires (allergies, intolérances) mais plutôt par le désir de varier les plaisirs. Consommer plus de produits naturels est synonyme de bien-être. Augmenter les aliments à base de plantes dans votre alimentation est une bonne première étape, car ils sont généralement faibles en acides gras saturés et riches en fibres, protéines, vitamines et minéraux.


Parlant des valeurs de la cuisine africaine, pensez-vous qu'il est important de former la jeunesse du continent aux métiers de bouche ?


C'est une priorité à mes yeux, la formation des jeunes est extrêmement importante, c'est elle qui représente l'avenir du continent. La formation de cette jeunesse assoiffée d'intégration et d'émancipation est essentielle au développement du continent.


Face à l'essor de l'hôtellerie en Afrique et à la volonté affirmée de géants comme Accor, Marriott, Hilton, Radisson pour ne citer qu'eux, de nombreuses formations voient le jour dans de nombreux pays comme le Sénégal (le Thelma School de Magatte Diop), Côte d'Ivoire (le secteur de l'école Yarani de Mme Marie-Odile Cachia) etc… Récemment au Congo sous la houlette de Mme Paméla Landreville. Concernant la restauration, des formations existent et se mettent en place pour assurer et accélérer le développement de ces structures sur le continent, les besoins en compétences sont rédhibitoires.Par exemple, au Sénégal, il existe déjà plus d'une vingtaine d'écoles hôtelières dispensant des formations aux métiers et techniques de la cuisine, de la restauration, de l'accueil ou de l'hébergement

Mais on est encore vraiment loin du compte, concernant les formations agricoles, même si certaines initiatives voient le jour, les formations agro-alimentaires et celles liées aux autres métiers de l'artisanat en général sont inexistantes, comme la boulangerie, la pâtisserie, la chocolaterie, boucherie et poissonnerie… Ces métiers ne sont pas des voies de garage, mais représentent bel et bien l'avenir, ils font partie des plus anciens métiers existant au monde, il est indispensable de les accompagner pour opérer leurs mutations et qu'ils connaissent, d'ici peu, un regain d'intérêt pour les jeunes.

N'oubliez pas que ces métiers de commerçants locaux font partie du paysage de notre quotidien, qu'ils nous paraissent immuables. Il serait intéressant d'organiser des webinaires pour présenter ces métiers de bouche qui sont en plein essor. Appelés commerces de détail alimentaires ou métiers de la restauration artisanale, ils sont comme beaucoup d'autres, en constante évolution.


Quelle est votre vision de la cuisine africaine ?


C'est un rêve, entre autres choses. Je me verrais pouvoir ouvrir plusieurs tables dans des Hôtels en Afrique dans divers pays comme le Congo, le Sénégal, la Côte d'Ivoire, le Togo, Djibouti, l'Afrique du Sud et bien d'autres pays ou continents. De l'idée que j'ai, pas de carte, les convives se laissent emporter par un chef et son équipe : « Pour maîtriser l'offre et le temps : je choisis la carte, les plats sortent au meilleur moment et Je contrôle l'atmosphère".


Une fantaisie gustative et artistique, pour moi, qui a longtemps voyagé avant de trouver mon mode d'expression. Aujourd'hui, le monde entier a une appétence pour la cuisine africaine, rajoutez à cela les techniques de la gastronomie française, avec au menu information, formation, accompagnement, suivi des jeunes afin de donner une chance d'acquérir les bases à travers différents ateliers pour aborder l'avenir avec sérénité, avec un objectif professionnel, personnel et en apprenant un vrai métier.

Interview par Enock Bulonza - Article original

 

 

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